Art

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L’artnote 1 est une activité humaine, le produit de cette activité ou l'idée que l'on s'en fait s'adressant délibérément aux sens, aux émotions, aux intuitions et à l'intellect. On peut dire que l'art est le propre de l'homme, et que cette activité n'a pas de fonction clairement définie.
Les Attributs de la peinture, de la sculpture et de l’architecture par Anne Vallayer-Coster, musée du Louvre.
Effectivement, les définitions de ce concept varient largement selon les époques et les lieux, et aucune d'entre elles n'est universellement acceptée. Ainsi, pour Marcel Mauss1, « un objet d'art, par définition, est l'objet reconnu comme tel par un groupe ». C'est pourquoi les collections de productions artistiques peuvent être classées et appréciées diversement selon les cultures, les auteurs et les institutions.
En Europe, depuis la fin du XVIIIe siècle2, ce terme recouvre principalement les produits dits des « beaux arts » tels que la sculpture, la peinture, l'architecture, les arts graphiques, et aussi la musique, la danse, la poésie et la littérature. On y ajoute depuis, parmi d'autres, le cinéma, le théâtre, la photographie, la bande dessinée, la télévision, le jeu vidéo, voire l'art numérique ou la mode. La classification des arts n'est toutefois pas universelle et rechercher une classification unanime semble impossible3, voire un anachronisme4.
Cette conception de l'art comme activité autonome, comme production par des artistes d'objets que l'on s'accorde à trouver beaux d'après une préférence de goût, date des XVIIIe et XIXe siècles. Mais on considère souvent que l'art moderne et contemporain ont abandonné la notion de beau ou de style intemporel pour ce qui semble être, très généralement, des principes de transgression ou de rupture5.
Partie supérieure du mihrab de la Grande Mosquée de Kairouan (Tunisie), un exemple d'art islamique du IXe siècle.
Au XXIe siècle, on assiste à la fois à la prolifération de la notion d'art (absorbant les civilisations anciennes, intégrant différents supports et obligeant à parler d'« arts », le tout avec des productions en expansion planétaire exponentielle[réf. nécessaire]) et en même temps à son dépassement par la civilisation du tout-écran, qui mêle tout. Un tel phénomène incite à donner des repères et à ne pas appliquer la notion occidentale d'« art » à l'ensemble de ce qui a une visée esthétique sur tous les continents, ce qui pourrait passer pour un néo-colonialismenote 2[Quoi ?]. Pour ce faire, il importe d'établir la chronologie et la géographie des productions dans une histoire générale de la production humainenote 3.
La Joconde, Léonard de Vinci, musée du Louvre.
Détail d'une peinture arabe du XIIIe siècle.

Sommaire

Histoire de la notion d'art : qu'est-ce que l'art ?

Depuis au moins l'Antiquité, la philosophie s'interroge sur la nature de l'art.
Pompéi, Maison VII, 2, 6 : Paquius Proculus et son épouse. Musée archéologique national de Naples, fresque du Ier siècle.
Platon dans l'Ion et l'Hippias majeur ou Aristote dans la Poétique s'interrogent sur l'art en tant que beau. Toutefois, l'esthétique antique diffère parfois notablement des esthétiques postérieures et le mot grec τέχνη (technè), qui est l'équivalent le plus proche du français art, désigne dans la Grèce antique l'ensemble des activités soumises à certaines règles. Il englobe donc à la fois des savoirs, des arts et des métiers. Les muses grecques ne sont pas toutes associées aux arts tels qu'ils seront définis par la suite et la poésie, par exemple, n'est pas une « technè »[réf. nécessaire].
La civilisation romaine ne distingue pas non plus clairement le domaine de l'art de celui des savoirs et des métiers bien que Cicéron et Quintilien y aient contribué par leurs réflexions. Ainsi, chez Galien, le terme d'« art » désigne un ensemble de procédés servant à produire un certain résultat :
« Ars est systema præceptorum universalium, verorum, utilium, consentientium, ad unum eumdemque finem tendentium6. »
« L'art est le système des enseignements universels, vrais, utiles, partagés par tous, tendant vers une seule et même fin. »
Dans cette acception du mot, qui a prévalu jusqu'à la fin du Moyen Âge, l'art s'oppose à la fois à la science conçue comme pure connaissance, indépendante des applications, et à la nature qui produit sans réfléchir6. À l'idée de règle de production s'ajoute la considération de l'effort requis dans cette activité. Lorsque le mot est employé, il lui est généralement attaché une épithète qui le précise pour former des expressions telles que « arts libéraux », « arts mécaniques », « art militaire », etc.6. Et s'il arrive parfois que les arts libéraux soient visés par l'emploi du mot non qualifié « ars », on est encore bien loin du sens contemporain ; l'astronomie était un « art libéral » tandis que le spectacle de « theatrica » restait un « art mécanique »7.
Jusqu'à la Renaissance, il n'y a pas de différence précise entre l'artiste et l'artisan : on appelle « artiste » un artisan dont la production est d'une qualité exceptionnelle. La différence ne commencera à devenir plus précise que lorsque les artistes commenceront à s'émanciper des corporations pour faire allégeance aux académies et à la commande nobiliaire8. C'est alors que le sens maintenant familier du mot « art » commence à se dégager : non seulement de nombreuses techniques s'en séparent, mais de plus, après la découverte des règles de la perspective, l'aspect visuel y prendra une importance croissante.
C'est du siècle des Lumières que date la notion d'art aujourd'hui communément admise. Partant d'une réflexion sur les sens et le goût, une conception basée sur l'idée de beauté finit par s'établir. Avec Emmanuel Kant, l'esthétique acquiert son sens propre d'une théorie de l'art dont le mouvement romantique donnera les exemples paradigmatiques. L'importance de l'observation de règles passe alors au second plan tandis que l'intention de l'artiste, qui vise nos sens et nos émotions, devient primordiale.
Jérôme Bosch, Kruisdraging (détail).
Mais le XXe siècle, par ses pratiques et ses idéologies, remet en question tout ce qui avait pu être retenu au siècle précédent. Il conteste en particulier l'existence d'une essence de l'art qui se retrouverait à travers les âges et les civilisations, et donc le rêve d'une définition universelle. Il souligne également le caractère parfois ambigu du rapport entre « beauté » et « art », par exemple lorsque l'œuvre d'art représente la nature de manière effrayante, voire repoussante9.
C'est pourquoi le discours européen contemporain sur l'art comporte un risque d'anachronisme dans la mesure où, selon ce discours, l'art impliquerait une intention qui n'existe pas forcément en d'autres époques ou en d'autres lieux. L'Art préhistorique par exemple, se réfère à des éléments artistiques comme des peintures ou des sculptures, mais aucun texte ne précise si ces éléments étaient destinés à la contemplation, à des célébrations rituelles ou à d'autres usages. Dans certaines cultures (par exemple indienne ou chinoise), de tels textes existent, mais il est difficile de déterminer dans quelle mesure les concepts utilisés, notamment ceux traduits en français par les mots « juste » ou « beau », sont identifiables à ceux utilisés en Occident9. L'introduction d'une hypothèse d'art inconscient ou involontaire pourrait permettre de contourner ce type de difficultés.
On donne souvent des listes plus ou moins complètes de domaines constitutifs de l'art, en notant ce qu'à la suite de Wittgenstein on appelle des « ressemblances familiales » : l'art devient alors un ensemble de pratiques et de résultats qui partagent un certain nombre de traits, bien qu'aucun d'entre eux ne soit universel10.
La liste classique des arts, telle que proposée au XIXe siècle par Hegel dans Esthétique ou philosophie de l'art, continue pour certains de servir de référence3. Elle indique, sans se vouloir pourtant exhaustive, que les principaux arts sont au nombre de cinq : architecture, sculpture, peinture, musique, poésie. Par combinaison ou par prolongement, on parvient à développer indéfiniment cette liste en y ajoutant, par exemple, la danse, le cinéma (souvent nommé « septième art »), la bande dessinée, l'opéra, la photographie, etc.

Histoire de l'art

Article détaillé : Histoire de l'art.
Les différentes conceptions de l'art et les difficultés de l'aborder dans sa globalité11 se répercutent sur les conceptions de son histoire.
Dans sa conception la plus classique, l'histoire de l'art s'est constituée au XIXe siècle en adoptant sans questionnement le progressisme et les valorisations de son temps. Dans cette optique naturaliste, qui considère l'art comme une constante de l'humain, elle décrit les instances qui dévoilent l'« essence » de l'art à travers les différentes époques.
Mais cette hypothèse d'une autonomie des phénomènes artistiques et de leur développement intelligible a été progressivement délaissée au profit d'une vision beaucoup plus contextualisée et sociale. Comme le note Antoine Hennion, « La méthode de la sociologie de l'art et celle de l'histoire de l'art s'opposent l'une à l'autre », la première tend à éliminer ce que la seconde essaie au contraire d'épaissir12. Dans ce cadre, l'histoire de l'art ne peut évidemment se construire qu'en tenant compte des évolutions de la notion d'art et elle est par conséquent sans cesse à reconstruire.
Une autre difficulté est liée au fait que relater les évolutions de l'art nécessite de procéder à des regroupements, le plus souvent par aires géographiques et par périodes historiques. Or la pertinence de telles délimitations est toujours à relativiser : à quel moment, par exemple, séparer l'Antiquité tardive du Moyen Âge ? Faut-il présenter l'art de l'Égypte ptolémaïque aux côtés de celui de l'antiquité grecque ? Ou encore, si l'on convient de considérer la poésie comme un art, faut-il ou non présenter les poèmes de Léopold Sédar Senghor du côté des arts africains ?
Conséquences de ces divergences de vues, les querelles sur la classification des arts sont nombreuses3 en histoire de l'art et en esthétique. Claude Roy résume ainsi ce pluralisme de la notion d'art :
« La notion d’art, qu’il s’agisse de l’art nègre, de l’art crétois ou de l’art impressionniste, reste à la fois imprécise, ineffable et irritante. L’art, c’est ce qui maintient vivante l’idole morte en tant qu’idole. L’art c’est ce qui dans un objet continue à servir quand il ne sert plus à rien13. »

Préhistoire

Article détaillé : Art préhistorique.
Si l'on considère que l'art consiste à bâtir, à sculpter, à réaliser des motifs ornementaux, l'existence d'un art préhistorique semble indiscutable. En revanche, si l'on voit dans l'art une sorte de luxe destiné aux musées et aux expositions, il est probable que les premiers peuples n'y aient jamais songé14. Enfin, si l'on considère, plus généralement, que l'art consiste à s'adresser aux sens et aux émotions de ceux qui en sont les spectateurs, il est difficile de ne pas qualifier d'artistes les auteurs d'un certain nombre de productions préhistoriques, comme les célèbres fresques de la grotte de Lascaux.
Quelle était la fonction exacte des sculptures et des peintures réalisées par ces artistes ? Nous ne le savons pas avec certitude, même si les hypothèses de fonctions rituelles, magiques, symboliques ou d'enseignement ont souvent été envisagées. Le travail de l'artiste aurait alors probablement eu comme visée première une efficacité « pratique », sans exclure pour autant une certaine recherche esthétique14.

Afrique

Illustration des arts africains dans l'encyclopédie suédoise Nordisk familjebok.
Article détaillé : Art africain traditionnel.
L'Afrique recèle d'innombrables arts locaux qui reflètent une grande variété de cultures qui ne cessent d'évoluer au fil du temps. Ces créations ont été considérées comme de véritables objets d’art surtout à partir du début du XXe siècle, notamment sous l’influence des peintres cubistes. La découverte de cet art a alors notablement influencé l'art moderne occidental15.
De nos jours, la plupart des œuvres africaines appartiennent à des collectionneurs privés, car, dans le passé, les musées ont négligé cet art. Depuis, les cotes pour des objets anciens authentiques se sont envoléesnote 4, et l’UNESCO en est venu à interdire depuis le début des années 1990 l'exportation de masques et de statues en dehors du continent africain15.
Le masque en bois, qui représente le plus souvent un esprit a longtemps été considéré comme l’objet typique qui symbolisait le mieux l’art africain. Mais progressivement d'autres formes sont venues au jour et en 1966 eut lieu le premier festival mondial des Arts nègres de Dakar, présentant au monde la richesse de l'art africain, avec des artistes comme Ousman Sow, Assane N'Noye, Paul Ahyi ou Ashira Olatunde15.
Depuis 1989, une biennale d'art africain contemporain se tient régulièrement à Dakar16.
En Afrique du Nord, avec l'arrivée de l'islam à partir du VIIe siècle, l'art musulman succède à l'art qui prévalait dans l'Antiquité tardive17, ainsi la Grande Mosquée de Kairouan (en Tunisie), élevée vers 670 et dont l'état actuel date du IXe siècle, compte parmi les chefs-d'œuvre de l'art des premiers siècles de l'islam18.
La Grande Mosquée de Kairouan, datant dans sa forme actuelle du IXe siècle, est l'une des œuvres majeures de l'art islamique en Afrique du Nord, située à Kairouan en Tunisie.

Asie

L'exemple du continent asiatique montre bien la difficulté d'établir des classifications d'histoire de l'art basées sur des continents et des périodes historiques.
Comment présenter avec une certaine cohérence un ensemble aussi large et aussi hétérogène que celui qui réunit :

Amérique

Tête colossale no 1 de San Lorenzo.
La culture olmèque, entre 1200 av. J.-C. et 400 av. J.-C.19, première des grandes civilisations de la Mésoamérique, est particulièrement connue pour la richesse iconographique et la qualité technique de son art, qui fut une référence et un héritage pour toutes les cultures postérieures. L’art olmèque se manifeste par une grande maîtrise de la sculpture et de la ciselure. Les artistes olmèques élaboraient leur art dans l’argile, la pierre et le bois ainsi que sur quelques peintures rupestres.
L'art maya se développe durant la période préclassique (2000 avant J.-C. à 250 après J.-.C)20,21, lors de l'Époque I et II. Il reçut les influences de la civilisation olmèque. D'autres civilisations mésoaméricaines, incluant Teotihuacan et les Toltèques, l'affectèrent et il atteignit son apogée durant la période de la civilisation classique ou Époque III (environ 200 à 900 après J.-C.). Les Mayas sont célèbres pour leur utilisation du jade, de l'obsidienne et du stuc.
Les artisans aztèques (1300-1519) excellaient dans l'art du masque en pierre, hérité des Toltèques, dont on faisait un usage funéraire ou religieux. Ils revêtaient de peintures les parois de leurs temples et de leurs palais.
L'Art amérindien est la forme d'art originaire d'Amérique du Nord. Aucune des langues autochtones d'Amérique du Nord n’a, semble-t-il, de mot correspondant au concept occidental d’art. Pourtant, les objets conçus par ses artisans sont aujourd’hui considérés comme des œuvres d’art à part entière.

Europe

Antiquité

Bien que celle-ci soit géographiquement située en Afrique, l'Art de l'Égypte antique, né il y a environ cinq mille ans, est l'une des principales sources de l'art en Europe. Il combine des règles strictes de régularité géométrique et une observation aiguë de la nature. Ses œuvres n'étaient pas destinées à être admirées par les vivants. On les plaçait dans les tombes des rois, puis progressivement dans celles de personnages de moindre importance sociale, afin d'aider l'âme des défunts à rester vivante22.
Mais l'art européen doit aussi beaucoup à l'Art de la Grèce antique. Dans ses premiers temps, aux alentours du Xe siècle av. J.-C., il est extrêmement sobre et géométrique. Par la suite, il s'inspire considérablement des règles établies par l'art égyptien, notamment en peinture et en sculpture.
Aux alentours du VIe siècle av. J.-C. se produisit une véritable révolution artistique : Les artistes commencent à s'affranchir des règles de l'art égyptien, qui imposaient de représenter chaque partie d'un ensemble (d'un corps humain par exemple) sous son angle le plus reconnaissable, au prix parfois de positions peu vraisemblables de l'ensemble. S'affranchissant de ces règles, ils se permettent de représenter un pied de face ou de cacher un bras sur un personnage représenté de profil : leurs peintures et leurs sculptures deviennent ainsi moins stéréotypées, plus naturelles23.
Vers la fin du VIe siècle av. J.-C., les artistes grecs sont toujours de simples artisans, mais un public de plus en plus nombreux s'intéresse à leurs œuvres. On compare les mérites des différentes écoles d'art, des maîtres des différentes cités. Certains d'entre eux, comme Praxitèle deviennent extrêmement célèbres. Un peu plus tard survient une autre évolution : alors que jusqu'ici les artistes s'efforçaient d'éviter de donner à leurs visages une expression trop précise, on commence alors à leur faire exprimer des sentiments et le règne d'Alexandre le Grand voit l'apparition d'un art du portrait23 que l'Art de la Rome antique reprendra et développera plus encore.

Moyen Âge

La Cathédrale de Reims est l'un des joyaux de l'art gothique en Europe Occidentale.
Article détaillé : Art médiéval.
L’art médiéval couvre un ensemble large de temps et de lieux, sur plus de mille ans d'histoire de l'art en Europe, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Cela inclut de nombreux mouvements de l'art et périodes, art régional ou national, genres, renaissances, métiers d'artistes, et les artistes eux-mêmes.
Les historiens de l'Art classifient l'art médiéval en périodes et mouvements principaux, les relations entre ces périodes sont parfois plus subtiles. Ceux-ci sont l'Art celtique, l'Art paléochrétien, l'Art des migrations, l'Art préroman et l'Art roman, l'Art gothique et l'Art byzantin. En plus de cela, chaque « nation » ou culture au Moyen Âge avait son propre style artistique et ceux-ci ont une existence individuelle, comme l'Art anglo-saxon, l'Art viking ou l'Art Islamique en Espagne (pour exemple l'Alhambra).
L'art médiéval comporte de nombreuses techniques, comme la mosaïque et la sculpture.
L'immense majorité de l'art qui nous est parvenu de cette période relève du domaine du religieux et renvoie à un cadre qui incorpore à la fois une pensée théologique ou cosmogonique et des fonctions proprement liturgiques. À cet aspect strictement religieux, il convient encore d'ajouter une dimension sociale ou civique. Ainsi, une œuvre pourra être étudiée et comprise sous ces différents aspects : un contenu proprement théologique qui s'exprimera souvent par des choix iconologiques de la part du ou des créateurs ; une fonction liturgique ou cérémonielle concrète qui sera une contrainte matérielle de l'œuvre, définissant parfois sa forme, sa structure ou ses dimensions ; une fonction publique d'exaltation du commanditaire, du donateur ou du récipiendaire.

Époque moderne

Léonard de Vinci, page de croquis sur l'anatomie humaine
Pour les historiens, l’époque moderne – on dit parfois les « Temps modernes » – couvre la période historique qui commence avec la fin du Moyen Âge. Les historiens français la font se terminer avec la Révolution française. Cette convention spécifiquement française ne sera pas utilisée dans ce chapitre, dans lequel on a préféré utiliser la convention internationale qui fait se terminer l'époque moderne 75 ans avant le présent.
On fait habituellement commencer la Renaissance artistique en Italie au XVe siècle24. Les Italiens nomment cette période le quattrocento. Elle se prolonge au XVIe siècle où elle atteint alors, dans de nombreux pays d'Europe, son apogée. Si elle redécouvre la mythologie et l'art antique, elle ne constitue pourtant pas un retour en arrière : les techniques nouvelles, le nouveau contexte politique, social et scientifique permettent aux artistes d'innover25. On redécouvre et on perfectionne considérablement la perspective. On développe la technique de la peinture à l'huile. Alors qu'au Moyen Âge la création artistique était essentiellement tournée vers Dieu et la religion chrétienne, c'est l'homme que la Renaissance artistique place au centre de ses préoccupations. Pour la première fois, l'art pénètre dans la sphère du privé : les œuvres ne sont plus seulement commandées par le pouvoir religieux ou séculier ; elles entrent dans les maisons bourgeoises24.
La Cité idéale à Urbino longtemps attribuée à Piero della Francesca
Joseph Mallord William Turner, L'Incendie du Parlement, 1835
On appelle habituellement « baroque » le style qui a succédé à la Renaissance au début du XVIIe siècle, mais ce mot n'a été employé que bien plus tard, par des auteurs qui trouvaient ce style grotesque et qui estimaient que les éléments de l'art antique n'auraient jamais du être employés autrement qu'à la manière des Grecs et des Romains26. L'architecture baroque utilise plus de courbes et de volutes, elle se lance dans le grandiose, comme dans le cas du palais de Versaillesnote 5 qui sera imité dans toute l'Europe. La peinture utilise plus de couleurs et de lumière. La musique de cette époque voit apparaître l'opéra. Ce mouvement atteint son apogée dans l'Europe catholique des années 170027.
Dans le courant du XVIIIe siècle, d'abord en Angleterre, on commence à remettre en question les habitudes du classicisme. Certains connaisseurs, souhaitant se distinguer des autres, sont en recherche d'originalité, notamment dans le domaine de l'architecture qui cherche une nouvelle inspiration jusque vers la Chine et l'art gothique. À la fin du siècle et au début du suivant, le romantisme s'efforcera de réhabiliter le sentiment face à la raison : des artistes comme Turner évoquent, à travers leur représentations de la nature, les émotions de l'homme face aux puissances qui le dépassent28.
Juan Gris, Portrait de Picasso, 1912
Ce rejet des traditions donne naissance a de nombreux mouvements, dont chacun se pare comme d'un étendard d'un nouveau nom en « -isme »29 (réalisme, naturalisme, impressionnisme, symbolisme…). Il a aussi pour conséquence une complexité plus grande des rapports entre les artistes et les acheteurs d'œuvres d'art: L'artiste ne souhaite plus nécessairement s'adapter aux goûts de ses clients. S'il le fait, il a parfois le sentiment de faire des concessions humiliantes. Mais s'il préfère travailler dans un splendide isolement, il risque d'être réduit à la misère30. Bientôt certains artistes en viennent à se considérer comme appartenant à une espèce différente et à afficher avec vigueur leur mépris des conventions et de la respectabilité. Au XIXe siècle, le gouffre se creuse entre les artistes à succès et les non-conformistes, qui furent surtout appréciés après leur mort30.
L'Art moderne naît à la fin du XIXe siècle et au début XXe siècle. Il voit apparaître en peinture les figures de Picasso, Matisse, Miro, Max Ernst et de nombreux mouvements comme le surréalisme, l'Oulipo, la Nouvelle Vague. Des architectes comme Frank Lloyd Wright osent privilégier l'organisation des pièces à l'ornement des façades et abandonnent le dogme de la symétrie31.
En France, avec la modernité, les peintres se détachent peu à peu du système des salons et de l'emprise de la bourgeoisie. Les grands collectionneurs contemporains, les galeries et les critiques jouent un rôle important. Le marché de l'art s'internationalise.
Alfred Stieglitz, photographie32 de la Fountain de Marcel Duchamp, 1917.
Marcel Duchamp représente l'objecteur fondateur de l'art conceptuel. Il ne se rattache pas plus à ses précurseurs que son intention n'est d'établir un art de l'objet. Ce qu'il cherche au contraire c'est sortir de l'art. Pourtant les ready-made de Duchamp (dont il est le concepteur) et ses objets cinétiques apportent une nouvelle dimension à la conscience esthétique, ainsi qu'une immense contribution à l'historiographie de la sculpture moderne, bien contre sa volonté33.
Dans le domaine de la peinture, un pas décisif est franchi dans les années 1910 lorsque Kandinsky ose l'art abstrait, qui ne représente pas des sujets ou des objets du monde naturel, réel ou imaginaire, mais seulement des formes et des couleurs pour elles-mêmes.
À cette époque, même lorsqu'ils ne renoncent pas aussi radicalement à la représentation d'un sujet, de nombreux artistes estiment que ce qui compte en art, c'est d'abord la forme, le sujet ne venant qu'en second34. Ils sont en recherche perpétuelle de nouveauté. Avec le surréalisme, ils cherchent même à créer quelque chose de plus vrai que la réalité elle-même35, à tenter d'atteindre une « réalité supérieure »36.

Époque contemporaine

Sculpture de Salvador Dalí
Plus on se rapproche de notre époque et plus il devient difficilenote 6, au milieu des modes éphémères, de distinguer les réalisations qui, par leur influence, relèvent de l'histoire de l'art37. Quelques grandes lignes de l'art de l'époque contemporainenote 7 semblent cependant pouvoir être tracées.
En peinture, à partir des années 1950, certains artistes concentrent leurs recherches sur l'acte physique de peindre et réalisent des œuvres abstraites en peignant, égouttant ou projetant de la couleur sur la toile. La structure du tableau résulte alors de l'intuition de l'artiste, mais aussi des divers comportements de la couleur (coulures…). Peindre apparaît alors comme un moment d'existence irréfléchi et pulsionnel et l'œuvre est un témoignage du corps vivant, en action et en mouvement dans l'instant. Ce mouvement sera dénommé tachisme, expressionnisme abstrait ou encore action painting aux États-Unis. L'Américain Jackson Pollock se fera particulièrement remarquer par cette technique. Il n'est pas sans évoquer la calligraphie chinoise dans sa recherche d'un jaillissement rapide et spontané37.
Le Manifesto de George Maciunas, lors du Festum Fluxorum Fluxus, Düsseldorf, février 1963
Beaucoup d'artistes contemporains sont fascinés par les effets de « texture » et renoncent à l'emploi de la peinture pour d'autres matières, dans des productions qui se situent parfois à mi-chemin de la peinture et de la sculpture. Le Op Art, notamment avec Vasarely, accorde un intérêt particulier à l'interaction des formes et des couleurs visant à produire des sensations de relief ou de mouvement37. Plus près de nous encore, dans les années 1960, le Happening, le Fluxus, (Joseph Beuys, Wolf Vostell, Nam June Paik), et le Art vidéo. Pop Art utilise des symboles populaires et prend en compte l'influence de la publicité, des magazines, des bandes dessinées et de la télévision dans les sociétés de consommation. Par des techniques industrielles, il remet en cause le principe d'unicité d'une œuvre d'art. Ainsi Andy Warhol reproduit les siennes par centaines, parfois même par milliers.
Truncated Pyramid Room de Bruce Nauman (Museum am Burghof de Lörrach, 1982-1998).
Plus généralement, l'art contemporain est traversé par les concepts et les thèmes qui agitent la société contemporaine: la dématérialisation de l'œuvre (Yves Klein), l'écologie profonde (Hundertwasser), la propagande visuelle et la publicité (Warhol), l'entreprise œuvre d'art ou vice-versa (Hybert), la fascination pour la révolution technique et les biotechnologies (Eduardo Kac), la chirurgie esthétique et la re-création corporelle de soi (Orlan).
Toutefois, la course effrénée à la nouveauté et le triomphe du modernisme conduisaient les non-conformistes à une contradiction : « Fallait-il être non-conformiste comme tout le monde ? »38 Ceci explique peut-être qu'on assiste depuis la fin des années 1970 à un retour du figuratif et à l'apparition d'une autre attitude, plus que d'un (encore) nouveau style, parfois dénommée post-modernisme.
Jean Prouvé (1901-1984), est un architecte et un designer autodidacte français. Au cours des années 1930, il collabore avec l'agence d'architecture dirigée par Marcel Lods et Eugène Beaudouin pour des bâtiments considérés comme précurseurs de l'architecture moderne en France : la cité de la Muette à Drancy ou la Maison du peuple à Clichy. Réalisateur également de mobilier, ses réalisations « sculptures dans l’espace quotidienne » – chaises, lits Antony, bibliothèques, bureaux Compas – sont exemplaires et figurent aujourd’hui parmi les plus cotés du XXe siècle (un fauteuil Kangourou s'est vendu 152 449 €, une bibliothèque peut valoir jusqu’à 160 000 €.)
Le sculpteur Remus Botarro (né en 1946, en Roumanie), il travaille à Vienne et à Paris. Auteur de monuments publics dans plusieurs capitales en Europe, il est aussi l'inventeur du concept auquel il a donné le nom de « l'Habitat de l'Avenir » ; le concept Botarro consiste à transformer l'espace immobilier habité en une œuvre d'art unique dans sa création, en harmonie et en relation étroite avec son occupant, lui conférant ainsi une valeur d'exception.
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